Tout ce qu’il faut savoir pour créer une entreprise à plusieurs

Vous avez une idée brillante et vous voulez la concrétiser ? Créer une entreprise à plusieurs associés est un moyen judicieux de rassembler les compétences, les ressources et la motivation nécessaires pour transformer votre rêve en réalité. Cependant, cette aventure entrepreneuriale partagée comporte son lot de défis à relever. Dans cet article exhaustif, nous vous guidons à travers les étapes cruciales de la création d’une entreprise à plusieurs associés, des choix juridiques à la répartition des pouvoirs en passant par les précautions à prendre.

1. Les statuts juridiques adaptés pour une entreprise à plusieurs

Le premier enjeu majeur lorsque vous créez une entreprise avec des associés est le choix du statut juridique. Contrairement à la création en solo qui offre plusieurs options simples comme l’entreprise individuelle, vous devrez obligatoirement constituer une société pluripersonnelle. Parmi les principales formes envisageables, deux se démarquent :

1.1 La SARL : souplesse et responsabilité limitée

La Société A Responsabilité Limitée (SARL) est un cadre juridique privilégié par de nombreux entrepreneurs associés. Elle offre une responsabilité limitée au montant des apports, ce qui protège vos patrimoines personnels. Le capital social est divisé en parts réparties entre 2 à 100 associés. La direction est assurée par un ou plusieurs gérants, qui peuvent être des associés.

1.2 La SAS : flexibilité et liberté contractuelle

Récemment, la Société par Actions Simplifiée (SAS) a gagné en popularité grâce à sa grande souplesse. Comme la SARL, elle limite la responsabilité au montant des apports. Mais elle se distingue par une plus grande liberté dans l’organisation de sa gouvernance et la création de différentes catégories d’actions. Un président est obligatoire, mais les statuts définissent librement les autres organes de direction.

D’autres statuts possibles mais plus rares

Parmi les autres formes sociétales envisageables à plusieurs, on peut citer la Société en Nom Collectif (SNC) où les associés répondent solidairement des dettes, ou encore la Société Anonyme (SA) à capital élevé et gouvernance stricte. Votre choix dépendra de vos objectifs, de vos moyens et du degré de responsabilité que vous souhaitez assumer.

2. Répartir les titres et encadrer les mouvements de titres

Une fois le statut juridique déterminé, l’une des premières décisions cruciales concerne la répartition initiale des titres (parts ou actions) entre les associés. Cette répartition définira les droits de chacun sur la société :

  • Pouvoirs de blocage ou de décision en assemblée selon les quotités détenues
  • Droits financiers (dividendes, plus-values) proportionnels aux titres
  • Poids dans la gouvernance et représentativité au sein des instances

Dans les SAS, vous pouvez même créer différentes catégories d’actions conférant des prérogatives distinctes à leurs détenteurs. Par exemple, des actions de préférence peuvent garantir un droit de veto à un associé minoritaire.

,

2.1 Procédures d’agrément et clauses encadrant les cessions

Après la répartition initiale, votre objectif est d’encadrer les mouvements de titres à venir. En effet, les entrées et sorties d’associés, les augmentations ou diminutions de capital peuvent chambouler les équilibres initiaux.

Dans les SARL, la procédure d’agrément est obligatoire pour toute nouvelle entrée. Les statuts peuvent renforcer cette procédure avec des clauses complémentaires. Par exemple, vous pouvez prévoir :

  • Une priorité pour les autres associés en cas de cession à un tiers
  • Des clauses d’inaliénabilité temporaire ou de rachat forcé
  • Des conditions suspensives liées au profil du cessionnaire

Dans les SAS en revanche, les associés définissent librement le régime des cessions. L’encadrement total ou au contraire la liberté peuvent être envisagés selon vos attentes.

2.2 Stratégies et enjeux autour des titres

Derrière ces dispositions techniques se cachent des enjeux stratégiques de taille :

  • Conserver son pourcentage de participation malgré les mouvements
  • Bloquer l’entrée d’associés indésirables ou concurrents
  • Empêcher un associé de devenir majoritaire de façon inopportune
  • Faciliter ou restreindre la valorisation financière des titres

La rédaction avisée des statuts et l’anticipation des différents scénarios vous permettront de sécuriser vos investissements et vos relations entre associés dans la durée.

3. Organiser la direction et la gouvernance

Au-delà des titres, la répartition des pouvoirs de décision est l’autre enjeu déterminant dans la création d’une entreprise à plusieurs. Selon le statut choisi, plusieurs options s’offrent à vous.

3.1 Direction et organes dans une SARL

Dans une SARL, la direction est assurée par un ou plusieurs gérants, obligatoirement des personnes physiques. Un gérant associé majoritaire sera affilié au Régime Social des Indépendants (RSI), tandis qu’un gérant minoritaire ou égalitaire relèvera du régime général de la Sécurité Sociale.

Au-delà de définir les pouvoirs de chaque gérant, vous pouvez aussi prévoir des organes complémentaires dans les statuts :

  • Un conseil de surveillance
  • Un comité stratégique informel
  • Des commissions ad hoc par projet

Ces instances permettent d’impliquer les associés dans le pilotage tout en répartissant les responsabilités.

3.2 Postes de direction flexibles en SAS

La SAS offre davantage de souplesse dans l’organisation de sa gouvernance. La désignation d’un président est obligatoire, mais vous pouvez lui adjoindre :

  • Un ou plusieurs directeurs généraux
  • Un conseil de surveillance ou conseil d’administration
  • Un censeur avec voix consultative
  • Toute autre instance prévue dans les statuts

Les statuts définissent librement les pouvoirs et modalités de nomination de chaque organe et dirigeant. Cette flexibilité vous permet d’adapter la gouvernance à votre configuration d’associés.

,

3.3 Répartition des pouvoirs entre dirigeants

Une fois les organes de direction définis, il convient de répartir précisément les pouvoirs entre chaque dirigeant. Cette répartition dépendra de plusieurs facteurs :

  • Le poids capitalistique de chaque associé
  • Leurs compétences et implications respectives
  • Votre volonté de concentrer ou de partager les pouvoirs

Dans une SARL par exemple, vous pouvez nommer plusieurs gérants avec des pouvoirs différenciés : l’un aux prérogatives plus étendues, l’autre limité à certains actes ou domaines précis.

En SAS, vous pouvez créer une présidence bicéphale ou au contraire l’assortir d’un directeur général très puissant. Le conseil de surveillance peut être simplement consultatif ou détenir des pouvoirs décisionnels accrus.

Le défi est de trouver le bon équilibre entre pouvoirs concentrés pour une gestion efficace, et pouvoirs partagés pour une gouvernance apaisée. Encore une fois, tous les scénarios sont permis, à vous de définir le schéma idéal.

3.4 Associer les dirigeants au capital

Pour garantir l’alignement des intérêts de vos dirigeants avec ceux des autres associés, vous pouvez judicieusement les associer au capital de l’entreprise. Cette participation capitalistique peut prendre plusieurs formes :

  • Attribution d’actions gratuites régulière selon les résultats
  • Stock-options à lever selon certaines conditions
  • Actions de préférence avec certains droits particuliers
  • Acquisition de titres à des conditions avantageuses

L’objectif est de motiver les dirigeants comme des associés à part entière. Les différents mécanismes envisageables permettent de répartir équitablement les fruits de la réussite commune.

4. Les étapes de la création à plusieurs

Au-delà des choix structurants, la création d’entreprise à plusieurs comporte de nombreuses étapes opérationnelles qu’il faut bien préparer en amont.

4.1 Le choix des associés

La première étape cruciale est évidemment le choix de vos associés. Bien que vos idées vous séduisent mutuellement, prenez le temps de bien vous évaluer sur différents critères :

  • Votre compatibilité humaine et façon de travailler
  • La complémentarité de vos compétences
  • Votre engagement financier respectif
  • Votre vision stratégique à long terme

N’hésitez pas à vous faire accompagner par un coach qui vous aidera à mieux vous connaître. Une période d’essai peut également être judicieuse avant de s’engager définitivement.

4.2 Établir les règles de fonctionnement

Parallèlement, vous devrez vous accorder sur les règles de fonctionnement de votre future entreprise. Un pacte d’associés permettra de fixer ces règles en détail :

  • Modalités de prise de décision au quotidien
  • Répartition des tâches et des fonctions support
  • Conditions de rémunération des dirigeants
  • Mécanismes de résolution des conflits
  • Politique de distribution des bénéfices

Ce pacte complète les statuts en apportant davantage de précisions opérationnelles. Il engage les associés tout en préservant leur bonne entente.

,

4.3 Rédiger les statuts constitutifs

Une fois les règles de fonctionnement actées dans le pacte d’associés, il faut les formaliser juridiquement dans les statuts constitutifs de la société. La rédaction des statuts est une étape clé qui requiert rigueur et expertise juridique.

Les statuts doivent comporter un nombre précis d’éléments obligatoires selon la forme juridique choisie, tels que :

  • La dénomination sociale et le siège
  • L’objet social, activités visées et durée
  • Le montant du capital, répartition et apports
  • La gouvernance, dirigeants et organes
  • Les règles générales de fonctionnement

Bien que constituant la « loi interne » de votre société, les statuts doivent respecter un formalisme strict et reprendre mot pour mot certaines dispositions légales obligatoires.

Pour assurer une rédaction sans faille, il est vivement recommandé de faire appel à un professionnel du droit des sociétés. Un juriste ou avocat d’affaires saura sécuriser vos dispositions statutaires.

4.4 Réaliser les formalités constitutives

Une fois les statuts adoptés, vous pouvez entamer les démarches administratives auprès du Centre de Formalités des Entreprises (CFE) :

  • Dépôt du capital social sur un compte bloqué
  • Immatriculation au RCS et autres organismes
  • Accomplissement des formalités complémentaires

Si vous optez pour une SARL ou SAS, vous devrez également publier un avis de constitution dans un Journal d’Annonces Légales (JAL). Cette étape achève la naissance juridique de votre société.

Enfin, il vous faudra mettre en place les éléments matériels de votre activité : local, outils de gestion, sites web, etc. La création sera alors complète !

5. Gérer les relations entre associés

Une fois l’entreprise lancée, l’enjeu est de préserver des relations saines et productives entre les associés au fil du temps. Des précautions s’imposent dès la création.

5.1 Définir les règles de prise de décision

Commencez par déterminer les règles de prise de décisions importantes dans les statuts et le pacte d’associés :

  • Mode d’adoption (unanimité, majorité qualifiée…)
  • Sujets nécessitant l’accord de tous
  • Voix prépondérantes en cas d’égalité
  • Conditions de révocations éventuelles

Plus ces règles seront claires, moins vous laisserez place aux conflits de pouvoir.

5.2 Gestion des désaccords

Malgré toutes les précautions, des désaccords surgiront inévitablement. Prévoyez dès le départ des mécanismes de résolution efficaces :

  • Procédures de médiation interne (commissions ad hoc)
  • Recours à un médiateur extérieur indépendant
  • Intervention d’un tiers expert (commissaire aux comptes)
  • Modalités d’exclusion en dernier recours

L’objectif est de régler rapidement les conflits avant qu’ils ne dégénèrent. Des dispositions anticipées faciliteront grandement leur résolution.

5.3 Clauses de sortie et modalités de départ

Enfin, pensez aux modalités de départ éventuel d’un ou plusieurs associés le cas échéant, en prévoyant notamment :

  • Des clauses de sortie encadrées
  • La valorisation des parts selon des critères objectifs
  • Les délais et formalités pour un départ organisé
  • L’obligation de rachat par les autres associés

Grâce à ces précautions, vous pourrez faire évoluer sereinement le tour de table sans perturber la société. Des associés pourront partir tandis que de nouveaux apporteront un vent de fraîcheur.

En anticipant tous ces cas de figure dès la création, vous poserez les bases d’une aventure entrepreneuriale partagée et durable, porteuse de succès pour tous !